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Derniers jours ! Exposition « Urban Text. Cet espace nommé Balkans » un frais espoir pour interroger l’Histoire

9 décembre 2022, par Marie Constant

« Urban Text. Cet espace nommé Balkans » est une exposition présentée par l’Institut des Cultures d’Islam jusqu’au 11 décembre 2022, avec les commissaires d’expositions Falma Fshazi, chercheuse en Histoire et Théorie de l’Architecture à l’École polytechnique fédérale de Zurich (ETHZ) et Docteure de l’EHESS – dont le sujet de thèse est l’organisation sociale de la jeunesse dans l’Albanie de l’entre-deux-guerres, son pays de naissance – et Bérénice Saliou, co-fondatrice avec l’artiste Younès Rahmoun de la résidence d’artistes Trankat en médina de Tétouan (Maroc), qu’elle dirige jusqu’en 2015 et désormais Directrice Artistique de l’Institut des Cultures d’Islam (ICI) établissement culturel de la ville de Paris. 

Avec les artistes : Mrdjan Bajić, Yane Calovski, Lana Čmajčanin, Igor Grubić, Dženan Hadžihasanović, Šejla Kamerić, Ledia Kostandini, KUMBIMA, Luiza Margan, Alban Muja, Stefano Romano, Selma Selman, Adnan Softić, Ivan Šuletić, Marko Tadić, Driant Zeneli.

Qu’est-ce que cet espace nommé Balkans ?

Pour monter cette exposition, il a fallu savoir saisir l’espace géographique des Balkans, un espace qui n’a cessé de se mouvoir, de se transformer comme le montre une des œuvres de Lana Čmajčanin (Bosnie-Herzégovine), Geometry of Time, 2014, qui ouvre l’exposition. C’est une vidéo qui montre la superposition de nombreuses cartes d’Europe du Sud-Est qui se sont succédées au cours des six derniers siècles.

« Loin de clairement délimiter des espaces, ces lignes se brouillent jusqu’à former un palimpseste de gribouillis qui souligne leur caractère illisible et arbitraire. Impérialisme, colonialisme, guerres, déplacement de populations et accords de paix ont constamment et intensément réécrit ce territoire. »


A ses côtés, une autre vidéo, Merry Ramadan, 2003 de Stefano Romano (Bergame, Italie et Tirana, Albanie) illustre la solidarité entre les cultures très diverses qui cohabitent grâce à ces redéfinitions incessantes du territoire. On voit donc une mosquée illuminée de décorations de Noël pour célébrer le Ramadan qui tombait cette année-là en décembre. Cette œuvre interroge alors la notion d’identité à travers le prisme de l’architecture, de l’urbanisme et des contextes sociaux, réunissant de manière inattendue des religions après qu’elles aient subies la dictature d’Enver Hoxha, la première dictature laïque au monde.

Le collectif Kumbima, quir egroupe plusieurs architectes et artistes, joue aussi avec cette idée de dialogue entre les croyances mais aussi l’athéisme. Le collectif propose de découvrir la société albanaise depuis les années 1990, tant sur le plan politique, culturel que religieux. Ainsi, l’installation audio et immersive, figurée par les domes transparent ci-dessous, diffuse des sons collectés à Tirana, la capitale albanaise. On y entend des chants d’oiseaux, l’appel à la prière, les cloches d’une église, des chants orthodoxes et catholiques, mais aussi des klaxons, des sonnettes de vélo ou la sonnerie d’une école… Qui montre le bien la pluralité des expériences multiculturelles qui se déroulent dans la ville.

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Marc Domage pour l'Institut des Cultures d'Islam-Septembre 2022

En regard de l’installation sonore du collectif Kumbima, le projet photographique de Ledia Kostandini (Albanie), let us meet in between, montre aussi l’évolution de son pays et sa pluralité, ses changements. Ainsi, elle utilise d’anciennes cartes postales de célébrations folkloriques, toutes envoyées aux membres de sa famille au cours des quarante dernières années. Elle retourne aux lieux emblématiques représentés sur la face des cartes pour en faire une photographie contemporaine.

Le passé et le présent mis côte à côte montrent bien un changement radicale jusque dans les paysages et monuments alors célèbres, le passé faisant référence à une vie sous contrôle et le présent symbolisant la liberté.

Les artistes face à l’Histoire

Ledia Kostandini n’est pas la seule à questionner le passé.

Cette relation à l’Histoire, qui ont l’a vu est multiple et complexe est un enjeu majeur pour les artistes de l’exposition : comment assumer l’Histoire, pas toujours fière ?  Comment utiliser, sauver et mettre à disposition du public les archives ? Comment se rire De l’ancien culte des leaders aujourd’hui remplacé par le culte de la consommation ? Comment s’inscrire dans l’Europe, en tant que puissance occidentale ? Comment faire un devoir de mémoire envers les femmes, la condition des femmes étant équivoque sur le fonctionnement d’une société car elles en sont systématiquement les premières victimes ?

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Marc Domage pour l'Institut des Cultures d'Islam-Septembre 2022

Ce sont les questions auxquelles tentent de répondre les artistes de cette émouvante et marquante exposition. A l’image de Mrdjan Bajić (Serbie) dont l’œuvre est représentée ci-dessus, présentant un dialogue de sculptures et de dessins tragi-comiques témoins d’un monde en mutation, balançant entre la nostalgie et les rêves d’émancipation de la classe ouvrière. Il y a quelque chose d’utopique.

Une exposition est brillamment intime, documentaire et politique dans toutes ses facettes, avec un regard critique et à la fois tendre au sujet d’un espace qui n’a eu de cesse d’être bouleversé et qui n’a de cesse de se réinventer grâce à la force de sa pluralité et qui sait intelligemment puiser dans ses racines.

Racines souvent symbolisées par le typique tapis kilim bosnien qui est présent sur plusieurs œuvres tout au long du parcours mais qui s‘étend également sur la façade du bâtiment, une fresque de Dženan Hadžihasanović (Bosnie-Herzégovine).

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Marc Domage pour l'Institut des Cultures d'Islam-Septembre 2022

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Urban Text
Institut des cultures d'Islam
Jusqu'au 11 décembre 2022
56 rue Stephenson, 75018 Paris
Du mardi au dimanche de 11h à 19h
Le vendredi de 16h à 20h
Gratuit

 




auteur
Marie Constant est rédactrice art et culture et chargée de projets artistiques. Vous pouvez retrouver ses conférences, articles universitaires et services sur son site internet.


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